Manifeste pour une pédopsychiatrie revitalisée

Par l’Association des psychiatres de secteur infanto-juvénile (A.P.I.)

Manifeste pour une pédopsychiatrie revitalisée

La crise aiguë

Nous, pédopsychiatres de service public, associatif et libéral, nourrissant un rêve pour nos enfants, l’avenir de notre société, sommes confrontés à l’occasion de cette crise du Covid-19 :

  • à l’absence de soins pour nos équipes de la part des tutelles et directions administratives hospitalières qui opposent restrictions/décisions/consignes aléatoires et changeantes à l’inventivité et à l’engagement des soignants ;
  • à l’absence et à l’archaïsme des outils techniques fournis aux services de pédopsychiatrie (postes informatiques, télémédecine…) ;
  • à la pénurie de masques et de gel hydroalcoolique pour les soignants de notre discipline.

La crise chronique

Nous affirmons qu‘il n’est plus supportable :

  • que les soins proposés aux enfants et leurs familles soient toujours plus insuffisants, « en mode dégradé » et toujours plus inégaux sur le plan territorial ;
  • que l’enfant ne soit plus envisagé dans son entièreté et sa singularité mais découpé en symptômes ;
  • que les bases théoriques de la pédopsychiatrie française soient abandonnées au profit de l’hégémonie de la classification américaine du DSM et d’une conception neuro-scientifique des troubles psychiques et de la relation humaine ;
  • que le manque de moyens humains des services de pédopsychiatrie ne soit pas reconnu et que les listes d’attente dans les structures de soin soient systématiquement présentées comme relevant d’un problème d’organisation interne ;
  • que le travail des soignants soit considéré uniquement comme un coût, variable d’ajustement d’équilibres financiers précaires ;
  • que la pédopsychiatrie soit condamnée par sa démographie (80 % des 730 pédopsychiatres français ont plus de 60 ans) et par l’insuffisance de l’enseignement faute de nomination de professeurs de pédopsychiatrie dans nombre d’universités ;
  • que le maillage territorial de secteur en pédopsychiatrie tende à être remplacé par de nouveaux dispositifs de coordination, dits « innovants », alors qu’ils recréent inutilement une organisation de soins déjà en place ;
  • que les directions administratives prennent la main sur l’organisation des soins, basée sur un néo-langage managérial qui brouille nos repères et dévalorise nos pratiques ;
  • que l’environnement dégradé des enfants (habitat, alimentation, mode d’éducation, mal-être de leurs parents) nuise à leur santé physique et psychique dès leur plus jeune âge.

Notre objet étant le soin à l’enfance, nous avons pour mission de nous projeter en permanence vers l’avenir, aussi emparons-nous, emparez-vous d’un possible !

Nous rêvons à :

  • la réintroduction du soin aux enfants comme une priorité nationale et une spécificité de cet âge de la vie ;
  • la valorisation des soignants comme des acteurs respectables et respectés du service public hospitalier et associatif ;
  • la relance de la formation de pédopsychiatres ;
  • l’affirmation de la place de la pédopsychiatrie publique de secteur comme dispositif répondant aux besoins de l’ensemble des enfants dans des conditions d’égalité, de continuité et d’accessibilité, et l’attribution de moyens suffisants pour lui permettre d’assurer cette mission ;
  • la reconnaissance du travail théorico-pratique et pluridisciplinaire ancré sur l’expérience de la psychiatrie de secteur, enrichie de concepts et outils innovants depuis sa création ;
  • la réattribution de moyens aux hôpitaux et l’installation d’une nouvelle gouvernance en cohérence avec des soins accessibles pour toutes les familles ;
  • l’installation d’une réelle protection de nos enfants contre les contenus numériques violents et pornographiques en accès libre ;
  • l’animation du débat public autour d’expériences qui révèlent un autre avenir, de l’éducation citoyenne concernant les besoins de l’enfant, de l’égalité homme-femme, du respect de la différence ;
  • la création d’un ministère de l’Enfance, affirmant la nécessité d’une protection spécifique et coordonnée, pour lancer un chantier de redéploiement du soin incluant l’habitat, l’éducation, les transports, l’alimentation, la culture, qui refondent les besoins fondamentaux de l’enfant.

Pour l’heure, de la périnatalité à l’adolescence, l’accueil et les soins auprès des enfants et leurs familles sont poursuivis sous des modalités plurielles et adaptées à chaque situation, à partir des permanences des CMP, CATTP, hôpitaux de jour, unités d’hospitalisation, accueils familiaux thérapeutiques et consultations d’urgences.

L’énergie considérable pour maintenir cette qualité de liens thérapeutiques et de soins psychiques auprès des mineurs, s’accompagne d’un élan franc et concret vers les familles touchées par l’épidémie ainsi que vers les soignants somaticiens en première ligne (plateformes téléphoniques, dispositifs d’accueil et d’écoute individuels et groupaux, construits en un temps record).

Nos actes d’ici et maintenant nous confortent pleinement dans la nécessité d’une pédopsychiatrie revitalisée à partir du socle existant.

Tribune publiée dans Le Point, le 20 avril 2020

 

 

 

Association des Psychiatres de secteur Infanto-juvénile

Qui sommes-nous ?

L’Association des Psychiatres de secteur Infanto-Juvénile (API) est née d’une démarche identitaire. En 1982 et 1983, le paysage de la psychiatrie publique fit l’objet d’un vaste projet de réforme intra- et extra-hospitalière qui envisageait, entre autres, la suppression des entités sectorielles infantiles (à l’époque dénommées inter-secteurs de psychiatrie infantile) et leur intégration à un plus vaste ensemble couvrant la totalité des besoins de la population concernée.

 Les pédopsychiatres du service public se sentirent d’autant plus mis en question par ce projet qu’ils venaient de vivre une décennie de grand développement, avec de nombreuses réalisations institutionnelles et la mise en place d’équipes pluri-professionnelles conséquentes. C’était la définition même de nos références théoriques et de notre champ de pratique qui nous semblait mise en cause. C’est dans ce contexte polémique (dont la défense catégorielle n’était pas exclue) qu’une trentaine d’entre nous se réunirent début 1984 à l’initiative du docteur  Paul Wiener.

 La création de l’API fut alors décidée, et le docteur Jacques Constant en fut le président fondateur. Notre but et nos perspectives d’action étaient très clairement de nous donner les moyens d’affirmer notre identité professionnelle. Ce fut d’ailleurs là le thème de nos premières journées annuelles, à Paris, en 1985. Nous n’étions ni une nouvelle société scientifique, ni un syndicat supplémentaire, mais un groupement de praticiens qui partageaient les mêmes pratiques et mettaient en commun leurs expériences. Le logo qui fut le nôtre pendant plus de dix ans illustrait cette notion de reflet pratique.

 Notre définition était double : être des psychiatres d’enfants dans le corps des psychiatres des hôpitaux, être des psychiatres de service public dans le champ de la psychiatre infantile. C’est en référence à cette place que nous avons consacré nos troisièmes journées annuelles, en 1987 à Saint-Alban, à la rédaction du Cahier des charges des psychiatres du service public de santé mentale pour enfants et adolescents. Dans ce document, nous déclinons ce qu’étaient nos droits et obligations, eu égard aux missions qui nous sont fixées par les autorités de tutelle, et dans le respect de notre éthique. La plupart de nos réflexions de l’époque nous paraissent encore d’actualité.

Docteur Jean-Pierre THEVENOT
Président d’Honneur

Site de l’A.P.I.

Le rôle de l’association

L’Association des Psychiatres de secteur Infanto juvénile est née en 1984, d’une démarche identitaire pour regrouper des praticiens qui partagent les mêmes pratiques et mettent en commun leurs expériences.

L’API défend :

– Un service public de qualité.

– Un système de prévention.

– Une offre de soins variée et innovante, pour tous les enfants et leurs familles.

L’A.P.I. favorise

– Le compagnonnage professionnel.

– La transmission et les échanges.

– La réflexion sur la place de la psychiatrie infanto-juvénile, dans un paysage socio-politique en mouvement.

L’API organise

– Les Journées Annuelles Nationales : trois jours de conférences et d’ateliers en mai/juin, où la liberté de ton et l’égalité des échanges permettent de mettre en perspective la richesse et la diversité des pratiques.

– Les Carrefours Annuels de la Pédopsychiatrie, organisé conjointement avec la Société Française de Psychiatrie de l’Enfant et de l’Adolescent & Disciplines Associées (SFPEADA), sur un thème d’actualité, le 1er Vendredi de février chaque année

– Les Rencontres de Perfectionnement des pédopsychiatres de service public, désormais nommées Journées du Collège de pédopsychiatrie de la FFP organisées  la Direction Générale de la Santé (DGS), sur des thèmes en lien avec les axes prioritaires en santé mentale.

L’A.P.I. propose

– Des rencontres locales, sous la responsabilité de délégués régionaux de l’A.P.I.

– Des échanges avec nos collègues européens et internationaux.

– La Lettre de l’A.P.I. : 2 numéros annuels pour les adhérents (comptes-rendus de journées de formation, débats, réflexions cliniques sur nos pratiques quotidiennes, notes de lecture et vidéos).

– Un site public : api.asso.fr, avec un accès réservé aux adhérents : forums, informations, cahier des charges de notre association, annonces, archives de la Lettre.

L’A.P.I. s’engage

– En faveur de l’accès aux soins pour tous, sans discrimination, ni stigmatisation.

– Pour la défense des droits de l’enfant et de sa famille.

– Elle a été membre co-fondateur du collectif « Pas de 0 de conduite », et a été signataire de l’Appel des appels.

– Elle soutient des projets de recherche clinique pour une éthique de la santé mentale de l’enfant et de l’adolescent.

L’A.P.I. est partenaire

Elle est membre de la Fédération Française de Psychiatrie (FFP),

Elle représente notre discipline dans des instances régionales et nationales: DGS, DGOS,  ARS, ConseilNational de Protection de l’enfance

Elle a participé à la Mission Nationale d’Appui en Santé Mentale (MNASM) et  participe aux travaux de la Haute Autorité de Santé (HAS).

L’A.P.I. rassemble

Des représentants dans les régions de France.

Un conseil d’administration élu en assemblée générale tous les 4 ans.

Un esprit de convivialité.

Un voyage à travers les richesses des secteurs de psychiatrie infanto-juvénile.